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Laura et Raymond Paccot - 24heures Odile Meylan

Le pétillant nature séduit simplement

10 août 2020

Les bulles du pet’ nat’ (ou méthode ancestrale) visent une clientèle jeune pour démystifier le chasselas.

Un produit pour bobos? Une nouvelle mode pour l’été? Certains amateurs de vins n’ont que mépris pour les vins nature, élevés sans le moindre intrant ou ajout au jus de raisin. Ils en ont tout autant pour le pet’ nat’, vilain raccourci de «pétillant nature». Pourtant, ces mousseux créés au plus simple s’inspirent de la «méthode ancestrale», et ont donc une longue histoire que deux domaines vaudois remettent au goût du jour.

Car, oui, la clairette de Die (vallée du Rhône), la blanquette de Limoux ou le gaillac effervescent (Sud-Ouest), ou encore, plus près de chez nous, le bugey-cerdon (Ain) sont faits avec cette méthode ancestrale qui porte bien son nom. Contrairement à la méthode champenoise (voir encadré), celle-ci n’utilise que le jus de raisin pour créer la bulle. Après un début de fermentation à froid en cuve, le vin est embouteillé avec un reste de sucre qui va continuer à fermenter avec le temps, et donc créer l’effervescence. Certains vont ensuite dégorger leur vin (retirer les lies qui restent), d’autres pas.

Les pionniers
En Suisse, on commence à trouver de jolis pet’ nat’, forcément chez les vignerons qui avaient déjà tenté le passage par la biodynamie puis l’expérience nature. Le Neuchâtelois Fabien Henriot, la Jurassienne Anne-Claire Schott, quelques Alémaniques et deux Vaudois. Au domaine de la Ville, à Morges, l’oenologue Corentin Houillon avait sorti deux vins nature avant un pétillant de chasselas, en méthode ancestrale. Après son départ l’an dernier, Ludivine Sper, qui lui a succédé, a réédité.
«Mais c’est compliqué, c’est long, surtout quand on le fait pour la première fois.» Elle a mis en bouteille lorsqu’il restait encore 42 g de sucre par litre, à mi-octobre. Puis elle a laissé les vins fermenter, avant de passer par le pupitre et le dégorgement à la volée. «C’est du travail quand il faut faire 2000 bouteilles.» Un reste de sucre dans le vin enrobe l’acidité.

Trois cuvées
À Féchy, Raymond Paccot et sa fille Laura sortent déjà un chasselas et un gamay nature dans leur domaine La Colombe. «C’est la suite logique de la biodynamie, explique le père. Redonner au vin son côté raisin.» Il y a trois ans qu’ils ont lancé les essais en méthode ancestrale, avec un chasselas vendangé tôt, en même temps que leurs pieds de cuve. En 2019, ils ont fait trois essais un peu différents, Raymond, Laura et leur œnologue Jason. «Plus c’est simple, plus c’est compliqué», sourit Laura. Six mille bouteilles de De Facto ont été mises sur le marché et trouvent rapidement preneur.
Mais, attention, quand on ne peut pas compter sur des adjuvants, aucune erreur n’est pardonnée. Résultat, les trois cuvées des Paccot ont chacune leur caractère selon le sucre laissé à la mise en bouteille et les lies qui en résultent. Et le goût est différent aussi. Celles de Raymond et de Jason ont dû être dégorgées, avant d’être bouchonnées en liège. «Quand le vin est brun, ça ne donne pas envie au client.» Laura, elle, a sorti un vin suffisamment clair pour rester tel quel, et être fermé par une capsule métallique. «Cela ajoute au côté nature, au côté simple du vin, affirme-t-elle. Et ça plaît à une clientèle plus jeune. Si c’est une porte d’entrée pour amener les jeunes au chasselas, c’est super.»

Style décontracté
«C’est vrai que les amateurs sont plutôt jeunes et décontractés, confirme Ludivine Sper. Ça n’a rien d’un champagne, et n’en a pas la complexité.» «C’est un vin de plaisir simple, à boire en été sans chichi», dit Laura Paccot. «Ça nous permet de sortir un pétillant moins cher, avec peu d’alcool, qui a de la fraîcheur et du fruit», conclut Raymond Paccot.

Méthode ancestrale 2019, chf 22.-
www.domainedelaville.ch
De Facto 2019, chf 18.50
www.lacolombe.ch

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